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CaMiLLe
3 août 2007

Vivre à Suan Mokkh : une expérience unique et déroutante…

Je vis tous les jours en communautés avec des personnes que je ne connais pas. J’ignore leurs prénoms, j’ignore leurs ages, leurs nationalités ou ce qu’ils font dans la vie. Je ne connais pas le son de leur voix ni la raison de leur présence ici. Pourtant, je me suis réveillée tous les jours à leurs cotés. Je me suis lavé les dents en même temps qu’eux, j’ai passé des journées entières à méditer dans la même salle. J’ai mangé à leur coté, les ai croisée maintes fois dans le parc. Bref, j’ai partagé leur quotidien pendant plusieurs jours. Leur visage m’est devenu familier au fil du temps. Je ne connais pas leur personnalité mais je les observe.

Il y a ce vieux monsieur au fond de la salle qui médite imperturbable semblant atteindre l’état de grâce a chaque séance. Il y a cette femme petite et ronde atterrie j’ignore comment ici et qui semble s’ennuyer profondément. Il y a dans le même genre cette autre femme dans la cellule d’en face qui soupire à tous les cours et s’endort à chaque séance de yoga . Il y a aussi ce mec au premier rang qui me rappelle les premiers de la classe du collège et qui se cambre tellement que je vois la moitié de ses fesses lorsqu’il médite. Il y a aussi une autre fille, la voisine de chambre de Julie qui a le don de l’emmerder au plus haut point avec sa clochette attachée au pied.

Et entourée de toutes ces personnes, je me sens seule. Bizarrement, je pensais être quelqu’un de plutôt solitaire mais même si ça me fait du bien aussi de me retrouver en paix, je choisirai la compagnie plutôt que l’isolement. La raison pour laquelle les règles sont ainsi est que de cette manière, nous n’avons que nous même sur qui nous reposer. Le temps durant lequel d’habitude on sort, écoute de la musique ou téléphone à nos amis, ici on le passe en tête à tête avec soi même, à se questionner. Dehors, si je déprime, je préfère me changer les idées, allumer la télé ou voir des gens. Ici, on n’a pas le choix que de ne compter que sur soi même. C’est ce qui rend l’expérience si dure au début et permet aussi de mesurer sa force mentale, sa capacité à surmonter ses angoisses et son isolement. C’est ce qui m’est arrivé le tout premier jour. Déprimée dans ma cellule, je ne me sentais pas la force de rester 10 jours. Puis, le mot de Julie sous ma porte m’a remis d’aplomb et je me suis remotivée, déterminée à y arriver.

Au fil des jours, on s’accoutume au mode de vie, à l’emploi du temps, au silence. C’est un style de vie tellement différent de tout ce que l’on connaît que c’est dur pour moi de concevoir que quelqu’un puisse vivre de cette façon. Les murs des chambres de montent pas au plafond, j’entend ma voisine de chambre pleurer doucement. Je devine la raison de son désarroi, il n’y a rien que je puisse faire. Peut-être un mot sous sa porte ??

Par ailleurs, vivre à Suan Mokkh, c’est comme si l’on vivait deux siècles en arrière. Ici, le strict minimum est suffisant, un bol et une cuillère pour manger, un bac d’eau commun pour se laver, on tire la chasse d’eau nous-même avec un seau, on utilise très peu l’electricité, on mange uniquement ce dont le corps a besoin c’est à dire une nourriture simplissime : riz à tous les repas, légumes et fruits (litchis/bananes).

A Suan Mokkh, on est tous moches… et on s’en fout ! Il n’y a absolument aucune glace dans le domaine, ni même vitre teintée ou surface qui se reflète, pas de fenetre, rien dans lequel s’apercevoir. L’absence de miroir rend les choses très simples, de même que l’interdiction d’utiliser tout produit censé embellir, maquillage et compagnie. On porte des vetements ultra larges, denués de toute elegance et on s’en porte très bien. On se rassemble tous dans cette negligence et on aime ca..

Bref, vivre à Suan Mokkh est une experience vraiment hors du commun, un mode de vie dur à choisir mais qui vaut le coup d’être vecu le temps de quelques jours, ne serait-ce que pour se tester, appréhender ses limites et sa force mentale. J’en garderai un très bon souvenir, une étape de ce voyage qui me marquera longtemps, qui m’aura aussi beaucoup appris et je ne parle pas de méditation mais du sens de ma vie en général et de moi-même.

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